C'est durant cette
dixième année de l'Hégire que le fils du Prophète
Muhammad (PSL), Ibrahîm, alors âgé de près d'une année
et demie, tomba gravement malade.
C'est au moment où la
religion et ses principes s'établissaient sur l'ensemble de la
péninsule, où l'adversité, où l'adversité ne cessait de diminuer
et où le nombre de conversions ne cessait d'augmenter, le
Prophète (PSL) voyait son unique fils quitter la vie et le
quitter. Il venait le voir tous les jours et restait de longues
heures à son chevet. Quand Ibrahîm rendit son dernier
souffle, le Prophète (PSL) le prit dans ses bras et le serra contre
sa poitrine alors que les larmes coulaient sur son visage et qu'il
sanglotait tant sa tristesse était profonde.
'Abd ar-Rahmân ibn
'Awf, son fidèle compagnon, fut surpris de ces larmes et de ces
sanglots parce qu'il pensait que le Prophète Muhammad (PSL)
en avait interdit l'expression. Le Prophète (PSL) ne put
d'abord parler, puis il lui expliqua qu'il avait interdit les
manifestations exagérées de détresse par les cris ou les
comportements hystériques, mais non l'expression naturelle de la
tristesse et de la souffrance. Puis il exprima verbalement sa peine
qui devenait, de fait, un enseignement spirituel, en affirmant que
ses larmes
«étaient des signes de tendresse et de miséricorde» (Hadith rapporté par al-Bukhâri et Muslim)
Il ajouta une réflexion
qui naissait de son expérience personnelle, mais qui valait somme
toute pour le quotidien de chaque musulman :
«Qui n'est point miséricordieux, il ne lui sera point fait miséricorde.» (Hadith rapporté par al-Bukhâri et Muslim)
Dans les moments
difficiles de la vie, la bonté, la clémence, la miséricorde et les
expressions d'empathie que les êtres humains s'offrent les uns aux
autres sont des qualités humaines qui les rapprochent des qualités
de l'Unique, d'ar-Rahmân (l'Infiniment Bon, le Très
Miséricordieux): par elles, Dieu se rapprochent du cœur du croyant
et lui offre et lui offrira ce qu'il a lui-même offert à son frère
en humanité.
Le Prophète (PSL)
était intimement affecté et n'hésitait point à manifester et à
exprimer son chagrin. Il ajouta :
«L'oeil pleure, Ô Ibrahîm, le cœur est infiniment triste et il ne faut pas exprimer que ce qui satisfait Dieu.» (Hadith rapporté par al-Bukhâri et Muslim)
Dieu l'avait mis une fois
encore, mis à l'épreuve de son humanité et de sa mission. Il avait
perdu tant d'êtres chers de ses compagnons, sa femme Khadîdja,
trois de ses filles et ses trois fils. Sa vie avait été traversée
de larmes mais il restait à la fois doux en son cœur et ferme dans
sa mission. C'était cette chime de la douceur et de la fermeté qui
trouvait satisfaction du Très Rapproché. Au moment où, en
cette dixième année de l'Hégire, le monde semblait s'ouvrir
à sa mission, son destin d'être humain semblait se réduire à
cette petite tombe d'enfant, dans laquelle le corps d'Ibrahîm
fut d'abord déposé et sur laquelle le Prophète (PSL)
conduisit ensuite la prière des morts. Le Prophète (PSL) était
un élu, le Prophète (PSL) restait un humain.
Quelques heures après
son retour du cimetière, une éclipse de soleil se produisit. Les
musulmans furent prompts à associer cette éclipse à la disparation
du fils du Prophète (PSL) et à y percevoir un miracle, une
sorte de message de Dieu à son Envoyé (PSL). Ce
dernier coupa court à toutes ces interprétations et affirma avec
force :
«Le soleil et la lune sont deux signes parmi les signes de Dieu. Leur lumière ne s'obscurcit pour la mort de personne.» (Hadith rapporté par al-Bukhâri et Muslim)
Le Prophète (PSL)
rappelait ainsi à ses compagnons l'ordre des choses et la nécessite
de ne pas se tromper das l'interprétation des signes afin de ne
point verser dans la superstition. C'était pour eux comme pour lui,
un enseignement spirituel de mesure et d'humilité. Les êtres
humains, tous les êtres humains et le Prophète (PSL) parmi
eux, devaient apprendre à partir et à voir partir les leurs dans le
silence, la discrétion et l'indifférence de l'ordre des choses.
L'épreuve de la foi,
celle qui fait couler les larmes du Prophète (PSL), était
bien d'apprendre à trouver, au cœur de l'éternité et de la
création, la force de faire face à la finitude de l'humain et à la
mort.
Le signe de la présence
de l'Unique à l'instant de la mort d'un homme n'est point dans
l’apparition d'un quelconque miracle, mais bien plutôt dans la
permanence de l'ordre naturel des choses telles voulue par le
Seigneur, Allah soub annahou wa talla.
Yathrib786
Le 09 juin 2019
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