14 octobre 2018

Le Pacte d’al-Hudaybiyya


Le Prophète Muhammad (PSL) reçut l’émissaire des Quraysh, Suhayl ibn ‘Amr, qui se présenta avec deux autres hommes (Mikraz et Huwaytib). Les négociations commencèrent un peu à l’écart des compagnons. Chaque point de l’accord fut discuté parfois de manière tendue. Lorsque les termes furent enfin conclus, le Prophète Muhammad (PSL) demanda à ‘Ali d’en retranscrire les termes. Celui-ci commença naturellement la rédaction du texte par la formule usuelle :


« Je commence par Dieu [au nom de Dieu] ? L'Infiniment Bon , le Très Miséricordieux »
«Bismillah ar-Rahmân ar Rahîm»


Suhayl contesta cette formule en affirmant qu’il ne reconnaissait pas  «ar-Rahmân», et qu’il fallait donc  indiquer la formule :
  

«En Ton nom, Ô Dieu !» (Bismika Allahouma)


Cette formule était la seule connue par l’ensemble des Arabes (même les polythéistes qui s’adressaient ainsi à leur dieu principal).
Des compagnons réagirent immédiatement en affirmant qu’il n’était pas question de changer cette formule, mais le Prophète Muhammad (PSL) intervînt et dit à ‘Ali d’écrire « Bismika Allahoumma » (Ibn Hischâm, op., cit., vol. 4, p. 284)

Puis il lui indiqua de poursuivre en écrivant :


«Tels sont les termes de la trêve signée entre Muhammad, l’Envoyé de Dieu, et Suhayl  ibn ‘Amr. »


Suhayl exprima son désaccord :


« Si nous avons su que tu es l’Envoyé de Dieu, nous ne t’aurions  pas combattu. Écris donc Muhammad ibn ‘Abd Allah (fils de 'Abd Allah). »


‘Alî qui avait déjà écrit la formule consacrée, refusa de céder et affirma qu’il ne pouvait pas faire une chose pareille. Le Prophète Muhammad  (PSL) lui demanda de lui indiquer où était inscrite ladite expression, et il l’effaça lui-même en lui demanda d’ajouter « fils de ‘Abd Allah ».

‘Alî et les compagnons étaient outrés et comprenaient mal l’attitude du Prophète Muhammad (PSL). Les termes de l’accord  allaient  les alarmer davantage, tant cela ressemblait à une série de compromis tout à fait désavantageux pour les musulmans.

Quatre points essentiels constituaient le fond du traité :


  1. Les musulmans ne pourraient accomplir le pèlerinage cette année, mais un séjour de trois jours leur serait assurée l’année suivante ;
  2. Un armistice de dix ans serait respecté par les deux parties, dont les membres seraient livres de voyager dans la région en toute sécurité ;
  3. Tous les clans ou parties seraient directement liés par les termes du présent accord ;
  4. Quiconque quitterait la Mecque pour se rendre à Médine chez les musulmans, devrait être remis aux chefs mecquois, alors que quiconque fuirait Médine et chercherait protection à la Mecque se verrait accorder un droit d’asile
(Ibn Hischâm, op., cit., vol. 4, p. 285)


Les compagnons parvenus à quelques de la Mecque pour accomplir leur pèlerinage, étaient en train de comprendre qu’ils devraient, à la suite de la signature d’un pacte qui ressemblait fort à un marché de dupes, s’en retourner sans avoir visité la ka’ba. Leur désappointement fut à son comble quand ils virent apparaître Abû jandal (le cadet des enfants de Suhayl, qui venait de signer le pacte). Celui –ci converti à l’Islam, avait encore des chaînes  aux pieds, et il venait se réfugier chez les musulmans après que son père l’eut emprisonné pour l’empêcher d’émigrer parmi les musulmans. Suhayl, à la vue de son fils qui s’était échappé, intervint et rappela au Prophète Muhammad (PSL) que, selon les termes de l’accord qu’il venait de signer, il ne pouvait le garder. Le Prophète Muhammad (PSL) l’admit et Abû Jandal, fut remis à son père tandis que le Prophète Muhammad l’exhortait à demeurer patient. Son frère, 'Abd‘Allâh qui était musulman depuis longtemps et qui assistait à la scène, était révolté par la situation. ‘Umar ne put se contenir lorsque Souhayl frappa au visage Abû Jandal. ‘Abd Allâh se précipita vers le Prophète (PSL) et l’apostropha vertement en le bombardant d’une série de question qui marquait sa totale désapprobation :


« N’es-tu pas le Prophète de Dieu ? Ne sommes-nous pas dans la vérité et nos ennemis dans l’erreur ? Pourquoi céder si honteusement contre l’honneur de notre religion. » (Ibn Hischâm, op., cit., vol. 4, p. 287)



Le Prophète Muhammad (PSL) lui répondit à chaque fois très calmement.  Cela ne suffit pas à satisfaire ‘Umar qu’une intense colère faisait maintenant bouillonner : il se retourna  vers Abû Bakr qui lui conseilla de se calmer car le Prophète (PSL) selon lui, avait raison. ‘Umar décida de se maîtriser et de se taire, même s’il continuait de penser que cet accord était une humiliation.

Suhayl et les deux autres envoyés quittèrent le camp en emmenant avec eux Abû Jandal, effondré et en larmes. Les musulmans qui observaient cette scène ressentaient une intense tristesse et une profonde révolte : l’attitude du Prophète était  incompréhensible. Il leur avait enseigné le courage et la dignité, et il acceptait un pacte injuste dans les conséquences  les obligeaient à observer, impuissants, le traitement indigne et humiliant de l’un des leurs.


Lorsque le Prophète (PSL) leur demanda de sacrifier les bêtes consacrées pour le pèlerinage, ils ne purent s’y résoudre.  Les blessures et l’amertume étaient trop profondes, et aucun des compagnons ne s’exécuta. Le Prophète (PSL) répéta trois fois son ordre, mais personne ne réagit.  C’était la première fois qu’il faisait face à une désobéissance collective et déterminée. Le Prophète (PSL) choqué et triste, se retira dans sa tente et expliqua à son épouse Um Salama ce qui venait de se passer  ainsi que le refus des compagnons d’égorger les bêtes. Elle l’écouta et lui proposa d’agir avec sagesse et en silence. Elle lui conseilla s’en mot dire et d’aller sacrifier son propre chameau en se contentant de donner l’exemple.

Le Prophète Muhammad (PSL) suivit son conseil et ce choix s’avéra judicieux. Il se dirigea vers son chameau, prononça la formule rituelle puis le sacrifia. Les compagnons, voyant cela, se levèrent les uns après les autres et firent de même. Le Prophète Muhammad (PSL) se rasa ensuite la tête et certains l’imitèrent, alors que d’autres coupèrent leurs cheveux  ou simplement une mèche.


Yathrib786
Le 14 octobre 2018

07 octobre 2018

Le serment d’allégeance (Bay’a ar-ridwân) au Prophète Muhammad (PSL)


Le Prophète Muhammad (PSL) fit appeler les compagnons après le refus des Quraysh de négocier. Ils devaient venir le rejoindre au plus vite.  Il alla s’asseoir au pied d’un acacia  et demanda à ce que chacun des musulmans lui prête un serment  d’allégeance, un serment de reconnaissance et de fidélité à sa personne  (ridwân).  La tradition soufie adoptera cette pratique du Prophète Muhammad (PSL).

Par ce geste, ils affirmaient explicitement qu’ils resteraient aux côtés du Prophète (PSL) quelle que soit l’issue de la négociation. Ils étaient venus accomplir un pèlerinage, ils étaient désarmés, et ils se retrouveraient face à la très grande probabilité d’un conflit auquel ils n’étaient point préparés.
L’affirmation de leur fidélité au Prophète (PSL) signifiait pour eux qu’ils prêtaient le serment de ne point fuir et d’aller jusqu’à accepter de mourir, tant l’équilibre des forces étaient en leur défaveur.

Le Prophète Muhammad (PSL) de son côté, mit sa main gauche dans sa main droite, et il affirma à l’assemblée que ceci représentait la prestation de serment de ‘Uthmân, qui n’avait point donné signe de vie et qu’il considérait comme mort (Ibn Hishâm, op. cit., vo. 4. 283)

Or ce dernier réapparut soudain, après la fin de la prestation de serment des derniers compagnons. Le Prophète (PSL) s’en réjouit. Non seulement ‘Uthmân était vivant, mais les Quraysh n’avaient pas point poussé leur folie jusqu’à manquer de respect à la clause commune de la non-violence durant les mois sacrés. La probabilité d’un conflit s’éloignait, et le Prophète Muhammad (PSL) fut informé que ceux-ci avaient finalement envoyé un nouvel émissaire, Suhayl Ibn ‘Amr, afin de sceller un accord formel avec les musulmans. Le Prophète (PSL) décida de le recevoir  et d’étudier leurs propositions.

‘Uthmân, avant cela, avait à son tour, et en personne, prêté le serment d’allégeance au Prophète (PSL) comme tous les autres. Il avait compris que l’expression de cette fidélité serait d’abord nécessaire dans le cas d’une potentielle situation de guerre. Heureusement, les choses s’inversaient et le Prophète Muhammad (PSL) allait entrer dans une négociation sur les termes de la paix entre sa communauté et les Quraysh. Ils avaient tous prêté un serment d’allégeance avec à l’esprit  l’idée qu’ils exprimaient là  leur fidélité dans une situation de faiblesse. Voilà que leur fidélité allait être, de façon inverse, mise à l’épreuve de la gestion et des  termes d’une trêve, d’un accord de paix qu’ils abordaient en position de force.

La révélation rapporte cette prestation de serment :

« Dieu fut satisfait des croyants des croyants lorsqu’ils le prêtèrent serment sous l’arbre. » (Sourate 48, verset 18)

Les musulmans étaient dans leur droit, ils portaient un message dont ils étaient sûrs qu’il était la vérité et ils avaient de surcroît acquis un grand prestige à la suite des dernières batailles. Il était hors de question de faire profil bas.


Yathrib786
Le 07 octobre 2018