Environ trois mille hommes
encerclaient désormais les forteresses des Banû
Qurayza. Reclus, enfermés avec peu de vivres, les Banû Qurayza résistèrent vingt-cinq jours, tant ils craignaient le
sort qu’ils supposaient devoir être le leur après la gravité de leur trahison. Le Prophète (PSL) envoya Abû Lubâba, un homme des Aws (qui avait antérieurement scellé un
pacte avec les Banû Nadîr et étaient
de fait restés proches des Banû Qurayza),
pour discuter des termes de leur capitulation.
Abû
Lubâba, face au spectacle de désolation qui régnait à l’intérieur
des murs de la forteresse, ne pût s’empêcher de faire comprendre aux Banû Qurayza qu’ils encourraient la
mort s’ils se rendaient. Comme nous l’avons vu, il regrettera entièrement son
geste, qui aurait pu pousser les Banû
Qurayza à ne pas capituler. Les Banû
Qurayza décidèrent cependant d’ouvrir les portes de leurs forteresses et de
reconnaître leur défaite.
Les femmes et les enfants
furent confiés à la garde de l’ancien rabbin
‘Abd Allah ibn Sallâm, et les sept cents hommes furent ligotés et mis à l’écart
dans un champ. Les biens et les armes furent collectés et rassemblés afin d’être
ramenés à Médine.
Les Aws envoyèrent immédiatement une délégation auprès du Prophète (PSL) afin de lui demander de
faire preuve, vis-à-vis des Banû Qurayza,
de la même clémence que celle qui avait été la sienne jusqu’àlors.
« Seriez-vous satisfaits si je demandais à l’un des vôtres (du clan des Aws) de prononcer la sentence à leur endroit. » (Ibn Hishâm, op. cit., vol. 4, p.198)
Ils répondirent
positivement, persuadés qu’aucun des leurs ne pourrait oublier les alliances passées,
et le Prophète (PSL) demanda d’aller
chercher Sa’d ibn Mu’âdh qui était
encore blessé et était soigné dans la Mosquée
de Médine.
Le
Prophète Muhammad (PSL) avait jusqu’alors gracié les
prisonniers, il avait plus tard rencontré certains des captifs de Badr parmi
ses plus farouches ennemies à Uhud.
Il en fût de même avec les Banû Nadîr
qu’il laissa partir avec femmes et enfants. Il retrouvait maintenant le chef Huyay, à la tête du complot des Coalisés. Parmi les prisonniers de Banû Qurayza, il y avait également un
grand nombre de ceux qui avaient été exilés de Banû Nadîr. Sa clémence n’avait donc eu aucun effet sur la plupart
de ceux qui en avaient bénéficié, et elle envoyait un message peu
compréhensible dans toute la péninsule :
« Muhammad, pensait-on, contrairement aux usages arabes et même à ceux des juifs, ne tue jamais ses prisonniers. »
Sa clémence, maintes fois
trahie, était perçue comme un signe de faiblesse, sinon de folie.
Par ailleurs la gravité de
la trahison des Banû Qurayza était telle
qu’elle aurait signifié , si leurs plans s’étaient réalisés, la mise à
mort des musulmans, trompés de l’intérieur et écrasés par une armée de dix
mille combattants.
Sa’a
ibn Mu’âdh arriva enfin chez les Banû Qurayza, et il voulut d’abord s’assurer que son jugement
serait effectivement respecté de chacun. Il se tourna vers les chefs des
différents partis qui, à tour de rôle, affirmèrent qu’ils se conformeraient à
sa décision. Il interpella enfin le
Prophète (PSL) dont il pouvait craindre le désaccord. Il confirma qu’il ne
s’opposerait point à sa décision. Ibn Mu’âdh
jugea que les hommes devaient être mis à mort et que les femmes et les enfants
seraient considérés comme des captifs de guerre.
Le
Prophète Muhammad (PSL) accepta cette sentence qui fut
exécutée dans les jours qui suivirent. Un certain nombre de captifs furent
rachetés par les Banû Nadîr et Rayhânah,
une captive des Banû Qurayza devint l’esclave du Prophète (PSL).
Les sources divergent sur
ce qu’il devint d’elle :
- Elle devint musulmane puis, selon certaines sources, le Prophète (PSL) l’affranchit et l’épousa ;- D’autres rapportent qu’il l’épousa simplement- Et les derniers affirment qu’elle refusa le mariage et resta sa servante pendant cinq ans jusqu’à sa mort(Ibn Hishâm, op. cit. vol. 4, p. 205)
L’annonce
de la double victoire des musulmans se répandit dans la péninsule et y
transforma les perceptions te les rapports de force. Non seulement, ils avaient
résisté à une armée de plus de dix mille
hommes, mais ils avaient fait montre d’une détermination sans faille. Le destin des hommes des Banû Qurayza envoya un message
fort à toutes les tribus avoisinantes : les trahisons et les agressions
seraient désormais durement châtiées. Le message fut entendu, car une telle
situation ne se reproduisit plus jamais du vivant du Prophète (PSL).
Yathrib 786
Le 12 août 2018