La communauté de Médine venait d’accueillir les hommes
et les femmes qui s’étaient exilés en Abyssinie
et y avaient vécu près de quinze ans. A
l’instar de Ja’far ibn Abû Tâlib qui
était marié à Asmâ bint ‘Umays
et père de trois enfants. Um Habîba dont le mariage avait été célébré avec le Prophète (PSL) était du voyage. Elle
vint s’installer dans son appartement à proximité de la mosquée
La vie battait son cours.
Le nombre de musulmans devenait de plus en plus important. Ce qui exigeait de
la part du Prophète (PSL) de
multiplier les occasions d’enseignements et de déléguer cette tâche à ses
compagnons les plus fidèles et les plus compétents.
Des expressions d’hostilité
s’exprimaient ou survenaient ici et là. Le
Prophète Muhammad (PSL) continuait d’envoyer de petits contingents d’éclaireurs pour régler les choses. S’il fallait par
endroit combattre des tribus bien décidés à s’opposer à la suprématie de la
cité de Médine.
Usâma ibn Zayd
Le
Prophète Muhammad (PSL) avait envoyé une expédition auprès
des tribus de bédouins au nord et notamment des Banû Murra. Ces derniers ne
cessaient d’attaquer les fermiers juifs travaillant dans l’Oasis de Fadak ; oasis sous l’autorité du Prophète Muhammad (PSL). L’opposition
était rude. Les trente hommes envoyés durant cette expédition furent tués.
Le
Prophète (PSL) décida d’envoyer un second convoi de deux
cents hommes parmi lesquels se trouvait Usâma
ibn Zayd qui n’était âgé que de dix-sept ans.
La bataille fut difficile
devant l’alliance de plusieurs tribus alliées pour défaire les troupes
musulmanes et ainsi soumettre l’Osasis
de Fadak et ses richesses à leur autorité. Les choses tournèrent
néanmoins en faveur des musulmans.
Un des membres de la tribu
des Banû Murra se moqua d’Usâma et de son jeune âge. Celui-ci ne
put se contenir et décida d’en découdre directement avec son insurgé. En position de faiblesse, le Bédouin décida
de fuir et fut poursuivi par Usâmaqui, dans la colère, n’avait pas tenu compte de l’ordre donné par le chef de l’expédition
de toujours resté groupé. Il parvint à rejoindre son ennemi qui s’écria alors :
« J’atteste qu’il n’est de dieu que Dieu ! »
Mais Usâma n’en tint pas compte et tua le bédouin. Il s’en revint au
camp et raconta son histoire. Le chef du convoi de même que les autres soldats
furent choqués de son geste. Usâma
prit conscience de la gravit de sa faute et s’isola jusqu’à son retour à Médine.
Il alla directement voir le Prophète (PSL) qui l’accueillit d’abord
très chaleureusement, heureux de l’annonce de la victoire. Lorsqu’il eut raconté l’épisode du duel, le Prophète (PSL) manifesta une
désapprobation sévère et lui demanda :
« Usâma, l’as-tu tué alors qu’il avait dit : « Il n’est de dieu que Dieu. » »
Usâma
répondit que le Bédouin n’avait prononcé ces mots que pour éviter d’être tué, à
quoi le Prophète (PSL) répondit :
« As-tu donc fendu son cœur pour savoir s’il avait dit la vérité où s’il mentait. »
Usâma
était défait et eut peur que jamais sa faute ne soit pardonnée. Le Prophète (PSL) lui pardonna
néanmoins, non sans lui avoir soumis un enseignement fondamental quant à la
façon d’agir des hommes et les secrets de leur cœur.
Le Bédouin qui avait prononcé l’attestation de foi avait lancé un
message à Usâma. Dans les deux cas
de figure qui se présentait à lui, Usâma
ne devait pas le tuer. S’il était sincère, il est clair que sa vie devait être
épargnée. Alors qu’il ne l’était pas, son exclamation s’apparentait à un appel
à la paix et à la mansuétude. Or la Révélation,
dans ce cas, avait déjà commandé aux musulmans de faire preuve de discernement,
de réserve, et de chercher la pacification :
« Ô vous porteurs de la foi, lorsque vous sortez pour lutter dans la voie de Dieu, rester clairvoyants et ne dites point à quiconque vous offre la paix : « Tu n’es pas croyant », convoitant les biens de la vie d’ici-bas alors que c’est auprès de Dieu qu’il y a abondance de butin. C’est ainsi que vous vous comportiez auparavant, puis Dieu vous a accordé sa grâce. Restez donc clairvoyants (sachez distinguer) car Dieu est certes parfaitement Connaisseur de ce que vous faites. » (Sourate 4, verset 94)
Sentant sa mort venir, Le Bédouin appela à la paix. Usâma, lui, était mu par sa volonté de
défendre son honneur ici-bas. Il était donc
revenu à des pratiques tribales que sa compréhension de l’Islam aurait dû reformer en profondeur.
Usâma
se
promit de ne jamais plus se laisser emporter de la sorte et d’agir avec
discernement et respect. C’est à lui que le
Prophète Muhammad (PSL) confiera trois ans plus tard (au moment de quitter
ce monde) les recommandations et les enseignements qui constitueront l’essence
de l’éthique islamique en matière de guerre.
A l’évidence les secrets
des cœurs dépassent les limites de la connaissance des hommes. Le Prophète (PSL) a été lui-même un
modèle de prudence et d’humilité quand il s’agissait de se prononcer et d’agir
vis-à-vis d’individus dont la sincérité ou les intentions étaient sujettes à
caution. Il savait et connaissait les
agissements de nombreux hypocrites dans son entourage. Mais il ne prenait
aucune mesure particulière à leur intention. Il restait prudent, parfois
méfiant, mais se gardait de tout jugement définitif.
L’exemple le plus édifiant
fut celui de ‘Abd Allah ibn Ubayy.
Ce dernier avait plusieurs fois menti, avait fait sécession avant la bataille d’Uhud
et continuait à entretenir des relations avec les ennemis de la communauté
musulmane. Le Prophète (PSL) ne prit
aucune mesure de rétorsion contre lui et ses amis, si ce n’est de l’éloigne des
situations et des expéditions délicates. Le
Prophète (PSL) dirigea même la prière de mort lorsque celui décéda malgré
la forte réprobation de ‘Umar.
La Révélation interviendra :
« Ne prie jamais sur l’un d’eux (les hypocrites notoires) lorsqu’il meurt, ni te tiens pas près de sa tombe, car, certes, ils ont renié Dieu et son Envoyé, et ils sont morts dans l’iniquité. » (Sourate 9 verset 84)
Ce verset ferme et tranché
quant à l’attitude attendue de la part du
Prophète (PSL) à l’égard des hypocrites, transmet un message très exigeant
quant à la façon dont il faut agir avec eux dans la vie quotidienne et jusqu’aux
derniers instants de leur vie.
Yathrib786
Le 30 décembre 2018