21 mai 2018

‘Aïsha, un modèle de connaissance et de piété malgré la calomnie


‘Aïsha, la plus jeune femme du Prophète Muhammad (PSL), se nourrissait également de l’exemple de son mari et Prophète (PSL). Elle sera plus tard une source incomparable de renseignements sur la personnalité du Prophète (PSL), sur son attitude dans la vie privée et sur ses enseignements dans la vie publique. Elle fera part de la manière dont le Prophète Muhammad (PSL) était attentifs à ses attentes et à ses désirs lorsque, jeune encore, elle arriva dans la demeure conjugale.

Le jeu faisait partie de leur vie. Le Prophète Muhammad (PSL) n’hésitait jamais à y prendre part ou encore à lui permettre de satisfaire sa curiosité. Ce fut le cas lorsqu’une délégation d’Abyssinie vint rendre visite au Prophète (PSL). Les Abyssins se mirent à l’écart pour pratiquer divers jeux et danses traditionnelles. Le Prophète Muhammad (PSL) se plaça devant le seuil de sa demeure, permettant ainsi à son épouse d’observer le spectacle discrètement. Cette version est confirmée par al-Bukhâri et Muslim.

A de nombreuses reprises, elle mentionnera la nature particulière de son attention à son égard, de ses manifestations de tendresses, et de la liberté qu’il lui offrait dans son quotidien. Le contenu des traditions montre combien le Prophète Muhammad (PSL) lui parlait, échangeait avec elle et lui manifestait son amour et sa tendresse. En sa présence et dans sa manière d’être avec ‘Aïsha, il réformait par l’exemple les habitudes des Emigrés et des auxiliaires.
Les deux versets coraniques traitant de la tenue vestimentaire des femmes furent révélés autour de la deuxième année d’Hégire :

« Et dis aux croyantes de baisser leurs regards, de garder leur chasteté, et de ne montrer de leurs atours que ce qui en paraît et qu’elles rabattent leur voile sur leurs poitrines; et qu’elles ne montrent leurs atours qu’à leurs maris, ou à leurs pères, ou aux pères de leurs maris, ou à leurs fils, ou aux fils de leurs maris, ou à leurs frères, ou aux fils de leurs frères, ou aux fils de leurs sœurs, ou aux femmes musulmanes, ou aux esclaves qu’elles possèdent, ou aux domestiques mâles impuissants, ou aux garçons impubères qui ignorent tout des parties cachées des femmes. Et qu’elles ne frappent pas avec leurs pieds de façon que l’on sache ce qu’elles cachent de leurs parures. Et repentez-vous tous devant Allah, ô croyants, afin que vous récoltiez le succès. » Sourate 24 An-Nûr, verset 31)

« Ô Prophète! Dis à tes épouses, à tes filles, et aux femmes des croyants, de ramener sur elles leurs grands voiles: elles en seront plus vite reconnues et éviteront d'être offensées. Allah est Pardonneur et Miséricordieux. » (Sourate 33 Al-Ahzab, verset 59)

Le Khimâr était une pièce d’étoffe portée sur la tête et dont les pans flottaient en arrière. Le Coran prescrit aux musulmanes de les rabattre sur leur poitrine afin de couvrir leur cou. Les femmes du Prophète Muhammad (PSL), comme toutes les musulmanes respectaient cette prescription. Ce n’est que deux ans plus tard que sera établie la spécification de leur statut en tant que « femmes du Prophète ». Il ne leur sera plus possible de s’adresser aux hommes si ce n’est derrière un voile de protection (al-hijâb).

Avant la Révélation des versets appelant les épouses du Prophète (PSL) à se cacher aux regards des hommes, ‘Aïsha agissait comme toutes les femmes et était très présente dans la vie publique de Médine. Le Prophète Muhammad (PSL) l’impliquait et désirait que ses compagnons voient et comprennent, à travers son exemple, le rôle que les femmes et leurs épouses devaient prendre dans leur vie quotidienne et publique.
Une anecdote :
Un voisin Persan convia un jour le Prophète (PSL) à un repas. Ce dernier lui demanda : « Qu’en est-il d’elle ? » en désignant son épouse ‘Aïsha. Le voisin répondit par la négative, laissant entendre que l’invitation ne s’adressait qu’à lui. Le Prophète Muhammad (PSL) refusa l’invitation.

Le Persan renouvela son invitation quelque temps plus tard. Le Prophète (PSL) demanda à nouveau : « Qu’en est-il d’elle ? ». Le voisin répondit par la négative, et il essuya un nouveau refus de la part du Prophète (PSL).

Il renouvela une troisième fois son invitation et à la question du Prophète (PSL) : « Qu’en est-il d’elle ? » , il répondit par l’affirmative. Le Prophète (PSL) accepta l’invitation et il se rendit avec ‘Aïsha chez le voisin. (Hadith rapporté par Muslim)

Sans brusquer les conventions mais avec fermeté, le Prophète Muhammad (PSL) réformait les coutumes et les pratiques chez les Arabes et les bédouins de la péninsule. ‘Aïsha et avant elle Khadîdja, comme d’ailleurs l’ensemble des épouses et de ses filles, étaient présentes dans sa vie, actives dans la vie publique, conservant cette marque de fabrique qu’était la pudeur.

Le Prophète Muhammad (PSL) leur avait donné la latitude d’être et de s’épanouir, de s’exprimer et d’être critiques, et de ne point faire montre de fausse pudeur en n’osant point aborder des sujets délicats liés à leur féminité, à leur corps, à leurs désirs et à leurs attentes.

Des années plus tard, ‘Aïsha relèvera avec respect et admiration ce trait de caractère qu’était l’audace intellectuelle des femmes ansârites qui, à la différence de la majorité des femmes de la Mecque, osaient questionner et interpeller avec franchise :

« Bénies soient [quelles excellentes femmes étaient] les femmes des Ansâr que la pudeur n’empêche point de s’instruire [quant aux affaires de leur religion] » (Hadîth rapporté par Muslim)

Elle avait elle-même été formée à cette école par le Prophète (PSL). Elle était présente lorsque avaient lieu les Révélations, elle restait au côté du Prophète (PSL) au moment où il transmettait le message ou donnait des recommandations et des conseils, ou simplement lorsqu’il était seul et vivait sa religion dans l’intimité. Elle écoutait, questionnait et cherchait à comprendre les raisons et le sens des choix et des attitudes de son mari, et c’est grâce à sa mémoire, à son intelligence et à son esprit critique que plus de deux mille ahâdith (traditions prophétiques) ont été transmises par son intermédiaire et qu’elle a, corrigé la version des faits rapportée par d’autres compagnons.

L’amour que se témoignaient le Prophète (PSL) et ‘Aïsha était forte et intense ; ‘Aïsha n’a pas hésité à rapporter son attitude tendre et amoureuse dans leur vie quotidienne, sa proximité chaleureuse et attentive, même pendant le mois de Ramadân

Elle a fait part de ses questions au Prophète (PSL) sur la profondeur de son amour pour elle, de sa jalousie à l’égard de la défunte Khadîdja et de la façon dont il trouvait le moyen de la rassurer. Sa présence amoureuse, attentive et intelligente a permis de façonner un portrait profond et subtil du dernier des Messagers (PSL).

Elle vivra plus tard, en l’an 5 ou 6 de l’Hégire, l’épreuve la plus difficile de sa vie. Lors du retour d’une expédition à Banû al-Mustaliq, constatant qu’elle avait perdu son collier, elle s’en retourna pour aller le chercher. Le convoi s’était remis en route sans s’apercevoir de l’absence d’Aïsha, qui voyageait dans un palanquin à l’abri des regards. Elle fut finalement raccompagnée par un homme, Safwân ibn al-Mu’atal, qui se trouvait à l’arrière de l’expédition. Des bruits commencèrent à circuler puis à s’amplifier sur ses relations avec Safwân ibn al-Mu’atal. On finit par l’accuser d’avoir trahi et trompé le Prophète Muhammad (PSL). Ce dernier en fut très touché d’autant que certains compagnons menaient une véritable campagne en répandant la calomnie (ifk) à l’égard de son épouse. Il s’éloigna d’elle pendant plus mois, mais ‘Aïsha resta ferme et clama, à plusieurs reprises, son innocence. Des versets allaient enfin révélés, qui non seulement l’innocentaient, mais condamnaient la calomnie et les calomniateurs, et fixaient très haut les conditions et les preuves qu’il était nécessaire de réunir pour porter un jugement sur le comportement d’une femme ou d’un homme en situation ambiguë ou douteuse.

« Ceux qui sont venus avec la calomnie sont un groupe d’entre vous. Ne pensez pas que c’est un mal pour vous, mais plutôt, c’est un bien pour vous. A chacun d’eux ce qu’il s’est acquis comme péché. Celui d’entre eux qui s’est chargé de la plus grande part aura un énorme châtiment.
Pourquoi, lorsque vous l’avez entendue [cette calomnie], les croyants et les croyantes n’ont-ils pas, en eux-mêmes, conjecturé favorablement, et n’ont-ils pas dit: «C’est une calomnie évidente?»

Pourquoi n’ont-ils pas produit [à l’appui de leurs accusations] quatre témoins? S’ils ne produisent pas de témoins, alors ce sont eux, auprès d’Allah, les menteurs.

N’eussent-été la grâce d’Allah sur vous et Sa miséricorde ici-bas comme dans l’au-delà, un énorme châtiment vous aurait touchés pour cette (calomnie) dans laquelle vous vous êtes lancés,

Quand vous colportiez la nouvelle avec vos langues et disiez de vos bouches ce dont vous n’aviez aucun savoir; et vous le comptiez comme insignifiant alors qu’auprès d’Allah cela est énorme.

Et pourquoi, lorsque vous l’entendiez, ne disiez-vous pas: «Nous ne devons pas en parler. Gloire à Toi (ô Allah)! C’est une énorme calomnie»?

Allah vous exhorte à ne plus jamais revenir à une chose pareille si vous êtes croyants.

Allah vous expose clairement les versets et Allah est Omniscient et Sage.

Ceux qui aiment que la turpitude se propage parmi les croyants auront un châtiment douloureux, ici-bas comme dans l’au-delà. Allah sait, et vous, vous ne savez pas.

Et n’eussent été la grâce d’Allah sur vous et Sa miséricorde et (n’eût été) qu’Allah est Compatissant et Miséricordieux...

Ô vous qui avez cru! Ne suivez pas les pas du Diable. Quiconque suit les pas du Diable, [sachez que] celui-ci ordonne la turpitude et le blâmable. Et n’eussent été la grâce d’Allah envers vous et Sa miséricorde, nul d’entre vous n’aurait jamais été pur. Mais Allah purifie qui Il veut. Et Allah est Audient et Omniscient.

Et que les détenteurs de richesse et d’aisance parmi vous, ne jurent pas de ne plus faire des dons aux proches, aux pauvres, et à ceux qui émigrent dans le sentier d’Allah. Qu’ils pardonnent et absolvent. N’aimez-vous pas qu’Allah vous pardonne? et Allah est Pardonneur et Miséricordieux!

Ceux qui lancent des accusations contre des femmes vertueuses, chastes [qui ne pensent même pas à commettre la turpitude] et croyantes sont maudits ici-bas comme dans l’au-delà; et ils auront un énorme châtiment,

Le jour où leurs langues, leurs mains et leurs pieds témoigneront contre eux de ce qu’ils faisaient.

Ce Jour-là, Allah leur donnera leur pleine et vraie rétribution; et ils sauront que c’est Allah qui est le Vrai de toute évidence.

Les mauvaises [femmes] aux mauvais [hommes], et les mauvais [hommes] aux mauvaises [femmes]. De même, les bonnes [femmes] aux bons [hommes], et les bons [hommes] aux bonnes [femmes]. Ceux-là sont innocents de ce que les autres disent. Ils ont un pardon et une récompense généreuse. » (Sourate 24 an-Nûr La Lumière, verset 11-26)

Cette épreuve a d’abord ébranlé ‘Aïsha comme le Prophète (PSL), mais elle a finalement renforcé leur amour et leur confiance. Plus largement, la communauté musulmane comprit que le malheur et la calomnie pouvaient s’abattre sur les meilleur(e)s de ses membres. La Révélation condamnait la calomnie, la médisance et la diffamation de la façon la plus ferme, rappelant aux musulmans, comme l’exprimera plus tard le Prophète (PSL), de « tenir leur langue » (Hadith rapporté par al-Bukhâri et Muslim)

Aïsha retrouvera naturellement sa place et deviendra une référence en matière de connaissance et de sciences islamiques.

Le Prophète Muhammad (PSL) conseillera à ses compagnons :

« Aller chercher la science auprès de cette jeune rouquine » Hâdith rapporté par Muslim.

Au-delà des doutes et des soupçons, au-delà de la calomnie, ‘Aïsha resta sincère dans sa foi et son amour du Prophète (PSL). Elle devint un modèle autant en matière de piété et de dévouement que dans son engagement intellectuel et social. Elle fut un modèle à la lumière de cet amour que le  Prophète (PSL) lui a témoigné.


Yathrib 786
Le 21 mai 2018

Aucun commentaire: