Pendant
que se déroulaient les évènements en Abyssinie, un autre évènement, extraordinaire,
vint à se produire à La Mecque : le prestigieux Omar Ibn Khattab, du
grand clan des Makhzoumites avait embrassé l’Islam. Il venait d’être touché par
une grâce d'una façon aussi soudaine que définitive.
Ce
« Saint Paul de l’Islam »,
comme l’appelle Renan, était une âme pleine de passion et d’intransigeance. Le
départ pour l’Abyssinie des Mouhajirûn, parmi lesquels il comptait des amis, l’avait
affecté.
Un
jour, ayant entendu que le Prophète Muhammad (PSL), auteur de tous ces maux,
tenait une réunion clandestine dans un des faubourgs de la ville de Safa, il prit son sabre et au comble de la fureur, décida d’aller
tuer le Prophète (PSL). C’était là le plus sûr moyen de mettre un terme au désordre et à la
sédition qui mettaient en péril l’ensemble de la société mecquoise.
- « Où cours-tu ainsi, Ô Omar ? »
Lui demande un de ses amis qu’il croisait en cours de
route. Nu’aym Ibn ‘Abd Allah, s’était secrètement converti à l’Islam.
- « Je cherche Muhammad ce sabéen », répond Omar
Il
révélait ainsi la confusion que faisait beaucoup en ces premiers temps de la
Révélation, entre la prédication de l’Islam et les conceptions religieuses de
certaines minorités présentes à la
Mecque.
Il
ajouta :
- « Je veux tuer celui qui a brisé l’unité des Qorayshs, ravalé ses croyances, dénaturé sa religion et blasphémé ses dieux !
- Tu ferais mieux d’aller voir ce que font les membres de ta famille, lui dit son interlocuteur.
- Qui sont les membres de ma famille ? demande 'Umar, au plus haut point de son courroux.
- Ton cousin et frère de circoncision, Saîd Ibn Zayd ? et sa femme, ta propre sœur, Fatima Ibn Khattab. »
Nu’aym,
prompt d’esprit, cherchait un moyen de faire diversion et conseillait à ‘Umar de mettre de l’ordre dans
sa propre famille avant de s’en prendre Muhammad (PSL). Il l’informa que sa sœur
Fatima et son beau-frère Sa’ïd s’étaient en effet déjà convertis à l’Islam.
Stupéfait et furieux, ‘Umar changea ses plan immédiats et décida d’aller
trouver sa sœur.
Le couple était en train
de lire et d’étudier le Coran avec le jeune compagnon Khabbâb lorsqu’ils
entendirent que quelqu’un s’approchait de leur demeure. Khabbâb cessait sa
lecture et se cachait. ‘Umar entendit qu’on récitait quelque chose. Il apostropha
sa sœur et son beau-frère de façon agressive. Tous deux nièrent les faits, mais
‘Umar insista en affirmant qu’il avait bien entendu qu’ils récitaient un texte.
Ils refusèrent de répondre, ce qui attisa la colère de ’Umar. Il se jeta sur son
beau-frère pour le frapper et lorsque sa sœur chercha à s’interposer, il la
frappa violemment et elle se mit à saigner. La vue du sang sur la figure de sa sœur
eut un effet immédiat, et ‘Umar s’arrêta tout net.
A ce moment précis, sa sœur
lui lança avec fougue :
« Oui, nous sommes musulmans et nous croyons en Dieu et son Envoyé. Quant à toi, fais maintenant ce que tu veux ! »
‘Umar resta interdit,
partagé entre le regret d’avoir blessé sa sœur et la stupeur de l’annonce qui
venait de lui être faite. Il demanda à sa sœur de lui remettre le texte qu’ils
récitaient au moment de sa venue. Sa sœur exigea de lui qu’il fît d’abord ses
ablutions pour se purifier. Calmé mais encore ébranlé, ‘Umar accepta, fit ses
ablutions, puis se mit à lire. Comme eux, ‘Umar était de ceux, rares, qui
savaient lire.
« Tâ-hâ. Nous ne t’avons pas envoyé le Coran pour te rendre malheureux, mais comme un Rappel pour celui qui craint le Seigneur. Et comme une Révélation émanant de Celui qui a créé le Terre et les Cieux sublimes. L’Infiniment Bon qui s’est établi sur le Trône. Le Souverain des Cieux, de la Terre, des espaces interstellaires et de tout ce qui se trouve dans les profondeurs du sol. Que tu élèves ta voix ou Non ? Il connaît tous les secrets et les pensées les plus intimes. Il est Dieu ! Il n’y a de divinité que Lui ! Et il porte les plus beaux Noms. »
Sourate Tâhâ 20, Verset 1-8
C’étaient les premiers
versets, et ‘Umar continua à lire la suite du texte qui relatait l’appel de
Dieu à Moise sur le mont Sinaï, jusqu’à ce qu’il parvienne au verset :
"En vérité, Je suis Dieu. Il n’y a pas d’autre Dieu que Moi ! Adore-moi et accomplis la prière afin de te souvenir de moi."
Sourate Tâhâ 20, Verset 14
‘Umar cessa alors sa
lecture et manifesta son engouement pour la beauté et la noblesse de ces
paroles. Khabbab, encouragé par l’apparente bonne disposition de ’Umar, sortit
alors de sa cachette. Il lui révéla qu’il avait entendu une invocation du Prophète (PSL) dans laquelle celui-ci demandait à Dieu de soutenir sa communauté par
la conversion d’Abu al-Hakam ou de ‘Umar ibn al-Khattab. ‘Umar lui demanda où
se trouvait Muhammad, et il lui indiqua qu’il était dans la demeure d’al-Arqam.
‘Umar s’y rendit. Devant la porte, les habitants eurent peur car ‘Umar portait encore son épée à la ceinture. Le Prophète (PSL) accepta qu’il entre et ‘Umar instantanément, annonça son intention de se convertir.
Le prophète s’exclama :
‘Umar s’y rendit. Devant la porte, les habitants eurent peur car ‘Umar portait encore son épée à la ceinture. Le Prophète (PSL) accepta qu’il entre et ‘Umar instantanément, annonça son intention de se convertir.
Le prophète s’exclama :
« Allahu Akbar ! » (Dieu est le plus grand) ; et il
reçut cette conversation comme une
réponse à son invocation.
Ce « Allahou Akbar » deviendra par la suite, avec « La Illaha illa ‘Llah », le
cri de ralliement de tout l’Islam.
Il n’était pas question
pour ‘Umar, étant donné son caractère, de garder son islam secret. Aussitôt
connue, la conversion du redoutable Makhzoumite causa une sensation énorme, en
raison du profond déséquilibre qu’elle provoquait dans le rapport des forces en
présence. Avec sa fougue et son courage , ‘Umar décidait d’aller voir Abû Jahl
pour lui annoncer la nouvelle. Il proposait au Prophète Muhammad (PSL) de faire
une prière au grand jour dans l’enceinte de la ka’ba. Le risque était là. Mais
il tenait à montrer aux chefs qurayshites que les musulmans étaient dorénavant
présents et déterminés . ‘Umar et Hamza connus pour leur forte personnalité,
entrèrent en tête du groupe dans l’enceinte de la Ka’ba. Les musulmans y
prièrent sans que personne n’osèrent intervenir.
« L’Islam de ’Umar fut une conquête (fath), son émigration (avec le prophète Muhammad (PSL) à Médine) une victoire, et son émirat (califat) une miséricorde. » Hadith d’Abdallah Ibn Massûd, reproduit par Ibn Hichâm.
A travers cette
conversion, l’Islam effectuait une large percée dans le seul clan
aristocratique qui pouvait rivaliser avec celui de la maison des Omeyyades,
jusqu’ici virulents ennemis du Prophète Muhammad (PSL).
Le Prophète Muhammad (PSL)
savait son impuissance sur les cœurs. Face à la persécution, en grande
difficulté, il s’était tourné vers Dieu en espérant qu’Il guide l’un ou l’autre
de ces deux hommes, dont il connaissait les qualités humaines autant que le
pouvoir de renverser l’ordre des choses. Le Prophète Muhammad (PSL) savait bien
sûr que c’est Dieu seul qui guide les cœurs.
Pour certains, la
conversation fut un long processus qui prit des années de questionnements, de
doutes, d’avancées et de retours en arrière. Pour d’autres, la conversion fut
instantanée, suivant immédiatement la lecture d’un texte ou en présence d’un
geste ou d’un comportement particulier.
Les conversions qui ont
pris le plus de temps n’étaient pas forcément les plus solides, et l’inverse n’était
pas vrai non plus. Dans l’ordre de la conversion, des dispositions du cœur, de
la foi et de l’amour, il n’est point de logique et seul demeure l’extraordinaire
pouvoir du Divin.
‘Umar était sorti de chez
lui avec la volonté de tuer le Prophète Muhammad (PSL), aveuglé par son absolue
négation du Dieu Unique. Puis le voilà, quelques heures plus tard, changé,
transformé, au terme d’une conversion dont la source fut le texte et le sens de
Dieu.
‘Umar était devenu l’un
des plus fidèles compagnons de celui dont il avait espéré la mort. Personne
parmi les musulmans, n’aurait pu imaginer que ’Umar reconnaisse le message de l’Islam,
tant il avait manifesté de haine à son encontre. Cette révolution du cœur était
un signe et portait un double enseignement : rien n’est impossible à Dieu.
Et il ne faut juger définitivement de rien, ni de personne. Il s’agissait et il
‘s’agit d’un rappel à l’humanité en toutes circonstances. Se souvenir du pouvoir
infini de Dieu cela veut dire apprendre de sa propre personne, à sainement douter
de soi et, vis-à-vis d’autrui, à suspendre son jugement.
‘Umar avançait et devenait
chaque jour un modèle pour les compagnons et pour l’éternité. Depuis le jour de
sa conversion, le surnom d’’Umar ibn
Khattab fut al-Farûq (celui qui
établit la distinction), en référence à sa volonté de distinguer la communauté
musulmane (ayant accepté la vérité du message coranique) des qurayshites (obstinés dans l’ignorance –
al-jâhiliyya).
Yathrib 786
08 octobre 2017
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