Le prophète Muhammad (PSL) affrontait l’humiliation et
la moquerie. On lui demandait des miracles et des preuves, et il répondait
inlassablement en citant le Coran et en affirmant :
« Je ne suis qu’un messager ! » Ibn Hishâm ? Op. cit., vol. 2 p. 158
La pression allait grandissant, et des manifestations d’opposition
de plus en plus violentes commençaient à
se faire jour. Les chefs de clans s’en prenaient surtout aux musulmans qui n’étaient
pas protégés ou directement aux pauvres.
Ainsi, Bilal avait été attaché par son maitre dans le désert en plein soleil.
Son maitre lui frappait le ventre avec une pierre en le forçant à renier son
Dieu, mais Bilal n’avait de cesse de répéter :
« Il est Unique, Il est Unique… » Ibn Hishâm ? Op. cit., vol. 2 p. 159
Plus tard, Abu
Bakr racheta Bilal (comme il le fit avec tant d’autres esclaves) et lui rendit
sa liberté. Celui-ci deviendra plus tard le muezzin (celui qui appelle à la
prière de Médine). Il était unanimement respecté pour la sincérité de sa foi,
son dévouement et la beauté de sa voix.
Un homme de la tribu des Makhzum du nom de `Amr allait
manifester son opposition à l’Islam de la façon la plus cruelle. Son surnom,
parmi les siens, était «Abu al-Hakam» (père du sage jugement). Les musulmans à
l’épreuve de son adversité mêlant l’aveuglement et la grossièreté, le surnommèrent
«Abu Jahl» (père de l’ignorance). Il
alla un jour à la rencontre du Prophète (PSL) et l’insulta avec une telle haine
que ceux qui l’entendirent. Même s’il n’étaient point musulmans, ils considérèrent qu’il avait enfreint le code de
l’honneur en humiliant ainsi le Prophète Muhammad (PSL).
Entendant cela,
Hamza, l’oncle du Prophète, s’interposa, alla trouver Abu Jahl, et le menaça de
représailles si un tel comportement
devait se renouveler. Il annonça dans le même temps son entrée en islam et
également qu’il se chargerait désormais personnellement de la protection de son
neveu. Abu Jahl cessa donc de s’en prendre à Muhammad, et se tourna vers ses
compagnons les plus vulnérables et pauvres
qu’il commença à maltraiter.
Le jeune ‘Ammar, d’origine yéménite, avait très tôt
adhéré au message de l’islam, et il s’instruisait avec le Prophète (PSL) dans
la demeure d’Al-Arqam. Son père, Yasser, puis sa mère Sumayya, se convertirent
peu après et se formèrent assidument à la nouvelle religion. C’est sur eux que
se déversa la haine vengeresse d’ Abu-Jahl . il se mit à les frapper, à les attacher au
soleil et à les torturer.
Le prophète (PSL), à cause du jeu des alliances, était impuissant
et assistait à ce traitement dégradant sans avoir les moyens de s’interposer.
Passant un jour à coté de Yasser et de son épouse qui subissaient les mauvais
traitements, le prophète leur lança :
« Soyez persévérants, Ô famille de Yasser, votre rendez-vous est au paradis. » Ibn Hishâm ? Op. cit., vol. 2 p. 128
Malgré les tortures, qui duraient depuis plusieurs
semaines, Sumayya et Yasser refusait de renier leur foi : maltraitée,
Sumayya apostropha Abu Jahl et lui dit en face ce qu’elle pensait de lui et de
son lâche comportement. Hors de lui, il la poignarda à mort puis, emporté par
la même furie, il s’en prit à son mari qu’il frappa jusqu’à la mort. Sumayya et Yasser furent les premiers
martyrs de l’islam (shubada) : persécutés, torturés puis tués pour avoir
tués pour avoir refusés de renier Dieu, Son Unicité, et la véracité de la
dernière des Révélations.
La situation devenait de plus en plus difficile pour
les musulmans et notamment, bien sûr, pour les plus vulnérables sur le plan de
statut social et de l’appartenance clanique. La protection du prophète était
assurée par ses oncles Abu Talib et Hamza, mais celle-ci était loin de s’étendre
à la première communauté spirituelle des musulmans. Les insultes, les rejets et
les mauvais traitements devenaient la règle. Le Prophète Muhammad (PSL) cherchait
une solution pour alléger les épreuves et les souffrances endurés par les premiers musulmans. Il eut l’idée d’approcher
Walid, le chef du de Makhzum, dont était issu Abu Jahl, et qui jouissait d’un
pouvoir conséquent sur l’ensemble de la société mecquoise. S’il réussissait à
le convaincre de la véracité du message ou, au moins, à le faire intervenir
pour qu’ils cessent les persécutions, ce serait un acquis de taille pour lui et
ses compagnons. Mais alors qu’il discutait et essayait de trouver un appui auprès de Walid, le Prophète Muhammad (PSL) se
fit apostropher par un aveugle, pauvre et âgé, qui s’était déjà converti à l’islam
et qui lui demandait de lui réciter du Coran. Le Prophète Muhammad (PSL) se détourna d’abord calmement puis fut
excédé par l’insistance de ce vieil homme qui perturbait ses plans et l’empêchait
d’exposer son propos et ses doléances à Walid. Ce dernier, dédaigneux, refusa
finalement d’entrer en matière. Une sourate sera révélée à la suite de cet
incident et imposera aux musulmans d’en tirer un enseignement pour l’éternité.
« Au nom d’Allah, le Tout Miséricordieux, le Très Miséricordieux.
Il s’est renfrogné et il s’est détourné
parce que l’aveugle est venu à lui.
Qui te dit: peut-être [cherche]-t-il à se purifier?
ou à se rappeler en sorte que le rappel lui profite?
Quant à celui qui se complaît dans sa suffisance (pour sa richesse)
tu vas avec empressement à sa rencontre.
Or, que t’importe qu’il ne se purifie pas».
Et quant à celui qui vient à toi avec empressement
tout en ayant la crainte,
tu ne t’en soucies pas.
N’agis plus ainsi! Vraiment ceci est un rappel -
quiconque veut, donc, s’en rappelle ! » Coran 80 Il s’est renfrogné, 1-12)
Le
Prophète (PSL) mu par son désir de protéger sa communauté s’est détourné d’un
aveugle. Il se voit rappelé à l’ordre par son Rabb-Educateur qui lui enseigne
de ne jamais se détourner d’un être humain, fût-il pauvre, âgé et aveugle, et
ce quelles que soient les circonstances difficiles dans lesquelles il peut se
trouver.
Recherchant
la protection d’un notable, le Prophète Muhammad (PSL) avait négligé un pauvre,
apparemment inutile à sa cause, qui lui demandait d’être spirituellement apaisé.
Cette méprise, cet écart moral est
relevé dans le Coran. A travers l’exposé de cette histoire, Dieu enseigne à l’homme
de ne jamais négliger ou s’éloigner des pauvres et des démunis, de les servir
et de les aimer.
Le
Prophète Muhammad n’oubliera jamais cet enseignement. A plusieurs reprises, il
se tournera vers Dieu pour l’invoquer en ces termes :
« Ô MON Dieu, nous Te demandons de nous offrir la piété, la dignité, la richesse (spirituelle) ainsi que l’amour des pauvres. » Hadith rapporté par Bukhârî et Muslim
Il
ajoutera :
« La richesse n’est pas dans la possession des biens ; la richesse tient dans la richesse de l’âme » Hadith rapporté par Bukhârî et Muslim
Le Prophète
Muhammad (PSL) pour les musulmans que nous sommes est un modèle par l’excellence
de son comportement, mais aussi par les faiblesses de son humanité. Dieu le
rappelle dans le Coran pour que la conscience musulmane n’oublie jamais.
Que
les pouvoirs, les intérêts économiques, sociaux ou politiques ne nous
détournent jamais des êtres humains , de l’attention et des égards auxquels ils ont droit, du
respect qui leur est dû. Rien ne doit
nous pousser à compromettre ce principe de foi au nom d’une soi-disant
stratégie politique destinée à sauver ou protéger une communauté d’un
quelconque péril.
Le cœur
sincère du pauvre sans pouvoir a mille fois plus de valeur aux yeux de Dieu que
l’accompagnement intéressé du cœur courtisé du riche. Souvenons-nous du règne
du Prophète Noé (Paix sur Lui).
Les
musulmans et malgré les injonctions du Prophète (PSL) ont oublié, bafoué et négligé
ce principe de respect et de dignité vis-à-vis des nécessiteux.
Très
tôt d’ailleurs, Abû Dharr al-Ghifârî, s’exprimera avec force et détermination
contre les dérives de certains musulmans
de plus en plus attirés par le pouvoir, le confort et le luxe.
Abu
Dharr y percevait le début d’une inversion de l’ordre spirituel, les signes d’une
aliénation profonde, et les prémices de catastrophes annoncées.
L’histoire
depuis nous a appris combien cette intuition était juste. Les compromissions
avec la proximité du pouvoir devenues presque naturelles sont bien liées à la
soif de possessions et de gains.
Alors
raisonne cet autre avertissement du Prophète (PSL) s’adressant aux musulmans :
«Pour chaque communauté, il est un objet de discorde, de tension et de désordre (fitna) et cet objet, pour ma communauté, est l’argent. » Hadîth rapporté par Muslim
Yathrib 786
27 août 2017
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